Parnasse nous a fait l’honneur de mettre en place une visite privée au Musée du Jeu de Paume de la première grande exposition sur Manuel Ãlvaro Bravo sans la présence de l’artiste (décédé en 2002).
Contre toute attente l’exposition ne met pas en avant les jeunes femmes dénudées ressemblant à Frida Kahlo, le Mexique ou le Surréalisme, tout ce que l’on s’attend à retrouver quand on pense au photographe mexicain. Les premières salles bousculent les attentes du spectateur et montrent la photographie moderniste à laquelle Manuel Ãlvaro Bravo s’est toujours profondément rattaché (en Europe le mouvement est mené par Rodchenko ou László Moholy-Nagy).
N’inventant pas l’objet comme les peintres, les photographes du début du XXe siècle ont toujours dû se battre pour montrer qu’ils étaient des artistes et pas seulement des « créatifs ». Cela passera, pour eux, par la captation et la monstration de l’objet. A l’inverse des pictorialistes, les modernistes mettront en avant le langage spécifique du médium et intégreront les notions de cadrage, plongée et contre-plongée, tout un aspect technique et scientifique en somme.
Les premières photos de l’exposition mettent en avant l’importance du cadrage dans l’œuvre d’Ãlvarez Bravo. Quand le peintre « reporte » la réalité, le photographe, lui, « découpe » la réalité…
Ci-dessous, Pajaritos de tiro al blanco (tir au pigeon), 1932 et Libros (livres), 1930
Organo de catedral, circa 1931
… créant alors des images très graphiques où les notions d’échelle et de planéité du monde sont bouleversées.
Ruina de ruinas, à Benjamin Peret, circa 1930 (gauche) et Arquitectura, detalle 2, 1932 (droite)
Ci-dessus « Ruina de ruinas » semble être un « collage » photographique, toute notion de profondeur est abolie. A droite « Arquitectura, detalle 2 », les ombres et les parties claires mettent tout à plat, le relief disparaît, on vise l’abstraction.
Ci-dessous abolition des notions d’échelle sur Juego de papel 3 (jeu de papier 3), circa 1928 (à gauche) et Ondas de papel (vagues de papier), 1928 (à droite)
La photographie moderniste de Manuel Ãlvarez Bravo allie deux forces: celle de la représentation et celle de l’abstraction.
« Amantes de la Luna falsa », 1967, sans les passants l’échelle serait impossible à déterminer.
Ci-dessous « Somewhat gay and graceful », 1942, une tache blanche, une tache noire et une dynamique apportée par un jeu de jambes, une photo minimaliste proche d’un tableau de Miró.
Vénus, 1979
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Manuel Ãlvarez Bravo. Un photographe aux aguets (1902-2002)
du 16 octobre 2012 au 20 janvier 2013
Musée du Jeu de Paume