Lara Gasparotto
Jusqu’au 2 juin se tient l’exposition Only you Only Me, images de l’amour, amour de l’image au Centre Wallonie-Bruxelles.
Je ne connaissais aucun des quatorze photographes et/ou vidéastes listés, hormis Erwin Olaf; ce dimanche en face du Centre Pompidou fut donc placé sous le signe de la découverte.
Parmi ceux qui m’ont le plus particulièrement ému Lara Gasparotto (née à Liège en 1989) capte ses amis dans leur quotidien et leur intimité, y pose un regard attentionné, voire amoureux. Il y a quelque chose de Nan Goldin que j’apprécie particulièrement dans cette série.
Lara Gasparotto
Lara Gasparotto
Chez Chrystel Mukeba, c’est l’évocation du temps qui passe, du regard attendri que l’on pose sur nos aînés vieillissants (elle à photographié sa grand-mère pour cette série), de l’absence à travers une nature morte qui m’interpelle.
Qui ne s’est jamais posé ces questions: « A quoi pense cette vieille personne assise en face de moi? », « Ressasse-t-elle des souvenirs de jeunesse? », « Quelle conscience du présent a-t-elle? » ou veux-t-elle simplement comme la Divine Garbo qu’on la « Leave me alone! »
Chrystel Mukeba, Confrontations (2009-2011)
« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé », écrivait Alphonse de Lamartine, dans son poème L’isolement. Il y a beaucoup de solitude et sans doute beaucoup d’amour dans les instants suspendus du photographe de renommée internationale, Erwin Olaf.
La tension qui règne dans ces intérieurs froids à l’esthétique de magazine de mode va de pair avec l’intensité des sentiments qu’expriment ses personnages suite à un amour perdu(?), un amour absent(?).
Et que dire de la série intitulé Neige, du photographe Capitaine Longchamps (né en Belgique en 1953)?
Chaque personnage masculin du film « un peu d’amour » (1923) est recouvert de pointillés blancs évoquant la neige, méthode de prédilection de recouvrement et d’interprétation des images baptisée « neigisme » par le photographe. Elle donne à sourire de par son caractère un peu iconoclaste, mais ne manque pas de nous interpeller sur la place de « l’autre » dans la relation.
Neige, 2010
La série d’Antonio Caballero, ci-dessous, est une de mes préférés. Le photographe mexicain saisi des instants à vive teneur dramatique, on croirait à des scènes de films latins où règnerait une haute tension entre les sexes, siège de la passion avec tous les ingrédients nécessaires: regards brûlants, guns, adultère et macho men.
Antonio Caballero, « Revista Capricho » (1960-1980)
Antonio Caballero, « Revista Capricho » (1960-1980)
Antonio Caballero, « Revista Capricho » (1960-1980)
Antonio Caballero, « Revista Capricho » (1960-1980
Que nous l’aimions ou la haïssions comme le disait André Gide, la famille et les souvenirs que nous créons avec elle, reste indispensable à notre développement. Plonger dans les albums de famille est souvent un moment riche en émotion. Que faire alors lorsque l’on est privé de ces « archives familiales »?
Le photographe Willy Del Zoppo, nous livre, à sa manière, une réflexion sur le temps qui passe. De vieilles photos de famille glanées dans divers marchés aux puces ou brocantes servent de support à son travail. Il met en scène ces anciennes photographies dans un nouveau contexte.
Ces photos dans leur nouvelle situation, ne demandent qu’à être « recueillies », « réappropriées » et ce dans une démarche solipsiste (soit les intégrer à la réalité, « l’existence certaine » de l’artiste) afin d’imaginer l’histoire de ces anonymes.
Willy Del Zoppo, « Les Archives solipsistes », 2011
Willy Del Zoppo, « Les Archives solipsistes », 2011
Pour clore l’exposition j’ai été fasciné par les vidos de Nicolas Provost. L’effet de répétition dans une œuvre artistique, que ce soit en musique, photographie ou peinture m’a toujours séduit.
Dans « Gravity », créé en 2007, Nicolas Provost juxtapose des extraits de vidéos issues de standards hollywoodiens. Tous ces extraits ont a trait avec l’amour (baisers et étreintes passionnées…). De par l’effet de scintillement provoqué par le montage, cette vidéo vient exciter notre regard. Les sourires, les corps à corps se répètent images par images mais ne sont en fait, jamais exactement les mêmes, tout comme en amour. « Gravity » à un effet hypnotique et stimulant comme lorsque l’on est sous le charme de l’être aimé.
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« Only you, only me, images de l’amour, amour de l’image » (jusqu’au 2 juin)
Centre Wallonie-Bruxelles
127-129 rue Saint-Martin 75004 Paris