Bastille Design Center | In-Carne, beauté incarnée

Exposé, surexposé, caché, pornographié, tatoué, scarifé, effacé ou starifié, où en est la représentation du corps aujourd’hui?

Avant-hier soir, In-Carne exposition d’un jour, prenait place au Bastille Design Center. Les artistes Annabelle Petit, Christophe Martinez, Emmanuel Lacoste et Alexandre Bardin se sont exprimés autour de la thématique de la beauté ainsi que sur le rapport que nous entretenons avec notre corps.

En utilisant différentes techniques (photographie, peinture, travestissement…) et en utilisant une ou plusieurs parties du corps (chair, cheveu, sang) ou toute représentation de celui-ci, ils apportent leur vision, ne nous laissant jamais indifférents.

In-Carne, comme tout ce qui a attrait au corps, dérange. A propos du cheveu, matière première de l’artiste Christophe Martinez, ne dit-on pas à la fois « sale comme un peigne » alors que Beaudelaire exalte celui-ci dans son poème « La chevelure ». La beauté est hautement subjective.

Christophe Martinez


Ci-dessus, Christophe Martinez, Set de table en cheveu, 2009 qui n’est paa sans rappeler Méret Oppenheim et son déjeuner en fourrure de 1936


Christophe Martinez, photographie de cheveux sous plexiglass


Christophe Martinez, « Cocofesse », 1998, copy-art cheveu (photographie sous plexiglass)


Christophe Martinez, « Duplicity », 1999, photographie sous plexiglass

Emmanuel Lacoste

s’interroge sur la projection de soi à travers une œuvre. Que transmet-on à la personne qui porte ou reçoit une œuvre que l’on a conçue?

Si l’on considère que certains créateurs de mode ont une démarche artistique voilà de quoi alimenter un passionnant sujet de discussion. Que transmettraient alors Martin Margiela, Hussein Chalayan ou Azzedine Alaïa à travers leur vêtement?


Emmanuel Lacoste « Essence 2011-« , tirage photographique sur aluminium.

Ci-dessus, la mère de l’artiste porte une chemise tachée du sang de son fils, « bouclant ainsi, le cycle de la création » (sic).

Annabelle Petit,

cite l’ésotériste arménien Georges Gurdjieff et nous propose à travers ses toiles et ses sculptures un voyage vers l’imaginaire et le surréel. Un voyage à l’intérieur de soi aussi bien dans la chair que dans notre esprit, palpable et impalpable.


Annabelle Petit, « I », 2011, acrylique sur toile


Annabelle Petit, « Bois de chair », 2011, acrylique sur bois de cerf

Alexandre Bardin

est adepte du travestissement, il incarne Vera Berkson personnage hypnotisant ayant vécu au début du siècle dernier.

Initiales V.B. comme Vanessa Beecroft, artiste aimant, elle aussi, utiliser son corps ou une représentation de celui-ci. Vera Berkson serait aussi à rapprocher de la comtesse Elisabeth Bathory de part certaines pratiques particulières… L’histoire de Vera Berkson indique que celle-ci aimait à porter des bijoux fait de métal et de chair (cf. photos ci-dessous)…


Collier métal et chair

On pense à « Vanitas, robe de chair pour anorexique albinos » de Jana Sterbak (1987), mais aussi à la superbe exposition de ce printemps Tous cannibales à la Maison Rouge.

Les artistes étant souvent annonciateurs de nouveaux comportements sociétaux, une micro-tendance se dégagerait-elle alors? Dans notre monde où semble s’imposer le préfixe « dé », on dé-mondialise, on dé-mode, on dé-matérialise, on dé-fiscalise, à venir une dé-sincarnation de nos êtres?

 

Luxe et luxure (licence de luxe)

 

Les jeunes gens des toiles de Terry Rodgers mis en scène de façon quasi-photo (et porno)graphique appartiennent à n’en pas douter à l’upper class, ils sont beaux, jeunes, multi-ethniques, riches et surtout blasés, des personnages de cire dont le regard ne se croise jamais…

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Screening room, 2006

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Artificial boundaries

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Love big

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Resting on her laurels, 2006

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This is our youth

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Terry Rodgers leaving his studio

Outre le style figuratif du peintre arrêtons-nous sur le côté fashion decadent de ces parties fines. Elles se déroulent dans des intérieurs feutrés, oscillants entre un style « à la palais de Venise » et une Nouvelle-Angleterre en plein relâchement.

A n’en pas douter ces « happy fews » ne laissent choir que des vêtements et des parures de créateurs.

Au petit matin on trouverait éparpillés deci delà, des déshabillés La Perla, des culottes Agent Provocateur, des petites choses Prada, des colliers d’Erickson Beamon, des caleçons Emporio Armani, des bijoux Heart de Swarovski ou Chanel, des chemises Dolce, des trucs en plumes, des tulles fins et précieux, des soieries, etc… Le tout porté par des jeunes gens alanguis tout droit sortis d’une pub Calvin Klein.

Tout çà est gentiment porno et surtout très chic.

Un tohu-bohu sexuel et sensuel qui rappelle la dernière campagne Pirates et Season of the witch d’Agent Provocateur, à la différence près que la luxure pour la maison créée par Joe Corre est festive et parodique, il y a là une dimension théâtrale.


Pirates


« Season of the witch » ou l’excentricité britannique au service de l’orgie.

Dans la campagne de communication de la marque du fils de Vivienne Westwood, ci-dessus, on entendrait presque les rires, les cris et les hourras, nous sommes au spectacle.

Dans la peinture de l’américain Terry Rodgers, on entendrait presque les râles et les soupirs, le bruissement des perles et des étoffes, on ressent l’atmosphère torride, la moiteur des corps, on respire le parfum de la luxure, il fait chaud on y est.

Sur le thème de la luxure et du luxe je vous invite à visiter le très beau site de Coco de Mer, autre enseigne britannique néo-baroque de lingerie érotique de luxe.

coco-de-mer-john-midgley-1

 

gémellité

Lorsque j’ai découvert la dernière réalisation de l’artiste Nagi Noda chez Stéphane, je n’ai pu m’empêcher de penser à la série Bêtes de mode réalisée en 2006 par Thomas Couderc et Clément Vauchez (Helmo) pour les Galeries Lafayette.


nagi noda, 2008


helmo, 2006


nagi noda, 2008


helmo, 2006


nagi noda, 2008

Deux très belles réalisations.


Visonnez cette pépite vidéo réalisée par Nagi Noda pour Coca-Cola.

Le site de Nagi Noda (RIP 7 septembre 2008)