Image | Hybrides au quotdien, I

Jörg Heiser, fondateur du magazine d’art Frieze à énoncé le concept de super-hybridité en 2010.

Tout semble hybride aujourd’hui dans notre société adepte du mash-up. Les nouvelles réalisations architecturales de Zaha Hadid pour la Maison du port d’Anvers, la cuisine en termes gustatifs et visuels ainsi que le design de Jaime Hayon ou Hella Jongorious. Les univers virtuels que nous côtoyons chaque jour via nos smartphones nous permettent avec notre avatar, d’endosser notre dualité. Avec notre double nous formons un nouvel être hybride, un méta-individu, un trans-individu. Hybridité, une tendance sociétale, artistique, culturelle et même politique.

Tantôt Docteur Jekyll, tantôt Mister Hyde, cet être hybride et virtuel peut alors expérimenter, tester, copier et coller sans-cesse, faire et défaire quasiment sans risque.

Notre société où l’on communique à la vitesse de la lumière et de manière multipolaire nous enjoint à avoir un comportement où l’on serait à la fois ici et ailleurs, on développe la nécessité(?) d’ubiquité, d’omniprésence et d’immédiateté.

Pratiquement, le concept de Jorg Heiser s’est vulgarisé pour devenir une tendance et s’est infiltré dans les représentations populaires. La génération Y à redécouvert la pratique du collage, des associations et du métissage. Cela s’est traduit ces dernières années par la multiplication d’images-hybrides (deux images en formant une nouvelle via un montage), juxtaposées ou mises côte à côte, les images se « répondant » alors l’une et l’autre.

Les images composants ces images-hybrides n’ont pas d’ordre chronologique et n’entrent pas dans la logique des montages « avant-après » des centres de beauté. L’allégorie ainsi créée communique le message: humour, détournement, surprise…

Dans un monde où nous sommes submergés d’images, remplaçant les mots. Ces images-hybrides sont-elles des chimères ou l’expression d’une certaine réalité? Elles nous obligent, en tout cas à réfléchir sur le pouvoir et le sens des images dans notre quotidien.

A lire Li Edelkoort doyenne des études de design hybride

Images-hybrides…

…glanées ces derniers mois

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Ci-dessous Sexy is Sexy par l’artiste Marc Turlan, 2014
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Campagne de communication du Printemps Carrousel Louvre, Paris, 2014hybrid-printemps hybrid-samsung hybrid-william-saurin

You and me

« What is yours is mine » Diesel summer/spring 2016 campaign reminds me this

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Yohji Yamamoto, Spring 1999 | Yves Saint Laurent, 1966 | you+me : Frederique Daubal, 2002

Die frau-maschine…

… la femme-machine(1)

Du défilé emblématique de Nicolas Ghesquière (photo ci-dessous) où l’on a vu défiler des mannequins en leggings dorés tout droit sortis du Métropolis de Fritz Lang, à certaines campagnes de publicité vues cette saison, se dessine une image de la femme, silhouette mécanique, robotique, digne d’un roman d’anticipation avec tous ses clichés.


Balenciaga, summer/spring 2007, coup de tonnerre sur les podiums


Maria, le robot de Métropolis


Spartiates techno-ethniques, cocon-carapace aux épaules et surpiqures exagérées créent une silhouette futuriste, stricte et structurée, un buste qui n’est pas sans rappeler certains robots japonais (voir ci-dessous)…


The Man-machine, musique de synthèse des robotiques Kraftwerk issu de l’album Die Mensch Maschine (The Man-Machine).

Chez Diesel, les visuels de campagne sont axés sur le thème de la vitesse (référence à la mécanique ?) Live Fast et High speed shopping sont les deux concepts développés cette saison. Les femmes perdent toute humanité dans un monde où tout va trop vite et où l’on doit faire vite, toujours plus vite, tels des machines.

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Vous reconnaissez la fiancée de Frankenstein ? Dans un atelier de modélisme transformé pour l’occasion en salle d’opération. À peine recousue, la voici on-the-go !

Chez les jumeaux de DSquared, femmes et hommes font corps avec des crash test dummies.


Tout les fantasmes y passent, sexe et mutation : le mannequin au premier plan simule l’acte sexuel avec un demi-robot ; toutes ces jambes emmêlés se confondent si bien que cette femme de chair et de sang se mue alors en androïde mi-femme mi-robot. Au second plan, la poupée de crash-test est remplacée par une femme.

Les visuels de Miu Miu, marque moins subversive que les deux précédentes, s’inscrivent, à mon avis, dans ce même mouvement.

Kirsten Dunst est une poupée ou une marionnette à fil. Les références à la Commedia dell’arte via les multiples représentations d’Arlequin dans la collection, les jeux d’ombres, le cerceau, nous inscrivent sur une scène entre le théâtre et le cirque, propice aux automates, ancêtre des robots.

Il règne dans toutes ces images une certaine inquiétude, une certaine morbidité. Arlequin dont l’origine ancienne viendrait d’une croyance médiévale, la mesnie Hellequin(*)(*), cortège magique composé de diables et de fantômes, est un personnage des enfers.

Toutes ces références traduisent-elles une peur du lendemain ?

A écouter « Das Modell » (The Model), by Kraftwerk