En ce mois de mai, des centaines d’ouvrages et de reportages sont consacrés à cet évènement qu’a été Mai 68, un trop plein dont on ne sait que retenir. En mode, rien d’hystérique, quelques articles de ci-de là pour nous rappeler ce que portaient les jeunes gens de l’époque. Les changements politiques, les mutations sociales et les manifestations que connurent Paris, Tokyo, Berkeley mais aussi Prague, les créateurs les avaient annoncés quelques saisons auparavant, à la manière de la présentation des collections femmes, six mois à l’avance…
Je vous propose un petit retour en images sur trois des révolutions vestimentaires qui marquèrent cette époque : le pantalon pour femme, la mini-jupe et le collant. Comme s’accordent à dire les analystes aujourd’hui, Mai 68, plus qu’un événement politique, est un soulèvement culturel et sociologique.
Le pantalon pour femme
Créé par Yves Saint-Laurent en 1965 ou 1966 selon les sources

Tailleur pantalon avec gilet, par Yves Saint Laurent (1967)

Tailleur pantalon à tunique longue, Charles Maudret (1966)
La tunique permettait à chaque femme, quelle que soit sa morphologie, de s’approprier le pantalon, gommant la saillie du bassin. Dès 1965 il se fabrique en France plus de pantalons que de jupes.
La mini-jupe
créée par Marie Quant, puis popularisée par André Courrèges (circa 1965)

À droite Marie Quant et deux de ses modèles

Mini, mini, mini
(source : Special Pop, Albin Michel)

Anne-Marie Boell, mannequin de l’équipe Courrèges, jupe au-dessus du genoux obligatoire, une attitude sportive et conquérante.
(source l’Officiel spécial Courrèges)

Outre les longueurs et les matières nouvelles, la mode s’industrialise, Yves Saint-Laurent devant la première boutique Saint Laurent Rive Gauche, 1967
Ci-dessous une photo emblématique, que je ne connaissais pas et qui montre l’implication de certains créateurs dans les événements du printemps 68.

Modèle Yves Saint-Laurent, 1967
(source Pierre Boulat, agence Cosmos)
Le collant
En 1967, vendus en boule dans un cube et non apprêtés, les collants Tels Quels de Dim sont quatre fois moins chers que le prix habituel.
« Si les hommes et une certaine catégorie de femmes – les moins jeunes et aussi les plus raffinées – ont gardé un goût vif pour les enveloppes de tulle au parfum de frou-frou, les jeunes garçons et filles, et les femmes d’aujourd’hui – qui travaillent, donc qui veulent être à l’aise, qui n’ont pas de domestique, donc qui veulent une fibre synthétique qui se lave facilement et ne se repasse pas et de préférence de couleur – ont un regard, disons plus sportif qu’auparavant sur le corps féminin (…) » (Katia D. Kaupp, Elle, 10 mars 1966)

trichromie en collant sur le mannequin Anne Pucie, 1968
Cette mode composée pour une jeunesse conquérante, faite de collants souvent opaques, aux couleurs vives et dans cette matière révolutionnaire qu’est le Lycra ™, ira de pair avec la mini-jupe. Le collant relèguera au rang d’accessoire érotique le porte-jarretelles. Ces bouleversements vestimentaires venus de la rue insuffleront un nouvel élan au Prêt-à-porter, mais aussi à la bijouterie.
Dinh Van a fait descendre le bijou dans la rue, l’a démocratisé en le réinventant par des formes épurées et ludiques. Son célèbre Pavé a justement été créé en 1968. Cet hommage rendu au symbole de cette période révolutionnaire est réédité. Et pour fêter l’événement une soirée fut organisée au Mini-Palais (le 21 avril dernier), réunissant people et plusieurs artistes du street-art dont Tanc et la célèbre Miss-Tic(1). Une rencontre entre le luxe et la rue bien dans l’esprit de ce bijoutier révolutionnaire.

Dinh Van, le joaillier libre, campagne de communication
Que reste-t-il de l’esprit de 68 ? Il y a quarante ans, la rue voulait rompre avec une « vieille France », celle de la Couture et de Tante Yvonne(2). La rue est aujourd’hui une source inépuisable d’inspiration pour la mode, le Prêt-à-porter permet aux femmes occidentales de s’habiller comme bon leur semble et la première dame de France est un ex top-model ! L’esprit révolutionnaire, l’envie de rupture se sont peut-être déplacées sur le web. Peut-être allons-nous entrer dans le temps des cyber-révolutions ?
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(1) L’agence Balistik’art m’a permis ainsi qu’à quelques blogueurs d’assister à l’événement, cliquez ici pour voir les photos de la soirée.
(2) Yvonne de Gaulle, première dame de France.





