IL Y A DE CELA QUELQUES SEMAINES LI EDELKOORT INVITAIT EN SON ATELIER. L’OCCASION DE RÉVÉLER AU PUBLIC INVITÉ UNE SCENOGRAPHIE DE MEUBLES INSPIRÉS DU STYLE SHAKER.
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IL Y A DE CELA QUELQUES SEMAINES LI EDELKOORT INVITAIT EN SON ATELIER. L’OCCASION DE RÉVÉLER AU PUBLIC INVITÉ UNE SCENOGRAPHIE DE MEUBLES INSPIRÉS DU STYLE SHAKER.
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La mode est le miroir idéal de nos comportements de ce côté-ci de la planète et bien entendu, en cette période frileuse à plus d’un titre, ce désir de retour à la mère-nature est fort présent dans les campagnes de communication de certaines marques cette saison.
Mettons de côté la go green attitude qui n’est pas une tendance mais un passage obligé à moyen-court terme pour l’industrie, de côté également certains créateurs comme Stella Mc Cartney, Kenzo où la nature fait partie de l’ADN de la marque.
Point de robe de bure, ni de sandales en corde, point de tendance Amish chez les autres créateurs, ici le retour à la nature est ostentatoire. Broderies, boutons dorés, col en fourrure, nœuds, franges sont nécessaires pour un séjour dans la grande maison familiale ou pour se retrouver entre amis dans la campagne, un nomadisme chic entre folk luxueux et un classicisme théâtral.
Un retour à la simplicité mais avec tout nos atours, délicieux paradoxe, parfaitement assumé.

danse chamanique entre amis, ce week-end, à la campagne.
(Gucci AW2008-2009, par Inez van Lamsweerde and Vinoodh Matadin).

The good ol’ days (vous noterez les arrière-plan peu engageants) : les couleurs, les imprimés
et les accessoires claquent pour signifier la chaleur du temps retrouvé. La famille se regroupe
autour de trois générations, parmi les poules, les labradors et les chevaux…
Dès lors, l’ensemble de nos instincts se réveillent, l’envie de grimper aux arbres, de s’allonger à même la terre mouillée. Tout comme nous l’ont signifié récemment les campagnes d’Aigle et de Wrangler nous ne sommes, après tout, que des animaux.

pour la réintroduction de l’homme dans la nature, Aigle.


we are animals, Wrangler (Mise-à-jour: campagne primée par le Grand Prix Presse à Cannes le 24 juin 2009)
Dans la vision de notre rapport à la nature ci-dessus, le vêtement est peu ou pas mis en valeur ce qui prime c’est la sensation, le vécu, de l’anti-glamour pur et dur, aux antipodes des campagnes Gucci ou Dolce & Gabbana. Autant j’apprécie la campagne print de Wrangler, autant la vidéo qui réinterprète assez « justement », me semble-t-il, l’activité nocturne de nos amis à quatre pattes peut laisser songeur, oscillant entre l’inquiétant et le morbide (voir ci-dessous).
À l’opposé, les séries photos présentes dans le dernier Numéro, présentent la sublime Stéphanie Seymour en femme-louve ultra-sexy, shootée par Greg Kadel.

Stéphanie Seymour, chimère en veste sans manches en mouton retourné (Dolce & Gabbana), bijoux d’ongles-griffes de chez Bijules NYC et une voilette surmontée de précieuses plumes par Noel Stewart.
La femme primitive
veste en renard de la maison Louis Vuitton et collier d’ossement d’Erik Haley, pour une Lucy des temps modernes.
La femme élémentaire
ou encore la femme-zèbre chez notre Jean-Paul Gaultier national
voire même en pintade de luxe chez Ralph Lauren…
On le voit le désir de simplicité par un retour à la nature, est interprété de diverses façons. Tantôt radicale anti-glamour et anti-consumériste, au point de dérouter ; tantôt festive (arrogante ?).
En ces temps incertains, dans nos sociétés qui se complexifient, où l’envie d’appuyer sur pause se fait sentir, le vêtement doit-il se parer de tous les atours ou au contraire créer des silhouettes basiques et sobres ?
En privilégiant la voix et le piano, PJ Harvey à créé l’an dernier avec White Chalk, un album dépouillé de tout superflu, rèche même, d’une émouvante sensibilité et d’une haute exigence. Pour autant qui à envie de ressembler à miss Polly Jean Harvey sur la pochette de son cédé ?
Peut-on imaginer, comme la chanteuse l’a fait avec sa musique, un retour à certains fondamentaux dans la mode ? Non pas un retour du courant minimaliste des années quatre-vingt d’Ann Demeulmeester ou d’Helmut Lang, mais un courant ou un créateur qui arriverait a synthétiser les paradoxes de notre époque.
Comme en musique électronique, une tendance low-fi va-t-elle apparaître dans la mode ? Une tendance qui créerait des vêtements d’aujourd’hui et de demain avec des tissus et des accessoires de récupération, par exemple.
De l’omnipotent LVMH à la discrète maison Hermès, du vintage chic de Didier Ludot aux modèles contemporains de netaporter.com, la mode est comme notre époque, multipolaire, fragmentée, hystérique, en plein mash-up. Redéfinir simplement certaines directions et certaines prises de position aiderait sans doute à y voir plus clair.
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Pour compléter ce billet, je vous conseille de lire :
Le catalogue du salon Maison et Objets consacré à la Simplicité dans le design.
De la simplicité par John Maeda, THE book d’un grand monsieur du design transversal où l’on apprend à aller à l’essentiel, à ne pas mésestimer les émotions et où il énonce ses dix lois de la simplicité.
Mise-à-jour du 24.11 : Le sujet est développé par Audrey aka Mekameta ici
Tout comme les maisons de couture qui célèbrent beaucoup d’anniversaires cette année, la sphère graphique fête cette année les 50 ans de la fonte Helvetica. Au premier abord et pour des personnes non averties ou peu sensibles, voici une police de caractère qui peut sembler quelconque, sans originalité, voire ennuyeuse. Regardons cela de plus près…
L’Helvetica fût créée en 1957 sur la base de la police Neue Haas Grotesk de Max Miedinger, graphiste suisse (helvétique quoi !), pour répondre à un besoin précis : dessiner un caractère qui colle à l’époque naissante, une époque moderne, en pleine accélération des techniques et des modes de vie.

Max Miedinger

La Neue Haas Grotesk…

… rebaptisée Helvetica en 1960 (habile repositionnement commercial), la police de caractère devient synonyme de « graphisme suisse », de rigueur et de précision.
Au début des années soixante, on voyage d’un bout à l’autre du monde dans un avion super moderne : la Caravelle, et les habitudes d’hier sont oubliées ; la société porte un nouveau regard sur les femmes et les enfants.
En art, on rompt avec tous les modes d’expression traditionnels, c’est l’époque de l’Art Contemporain, avec, entre autres, les mouvements Pop Art, Fluxus, Op Art. En architecture, des constructions radicalement nouvelles prennent vie : la nouvelle capitale du Brésil, Brasilia, pensée par Oscar Neimeyer, fût construite, dans ses grandes lignes, en à peine 3 ans !
A cette époque, toute entreprise voulant se donner une image dynamique et moderne choisit l’Helvetica pour sa communication.

Caravelle, Air France


Brasilia, Palais présidentiel et Cathédrale ©
1957 est l’année où Yves Saint-Laurent prend les rênes de la maison Dior, suite à la mort de son fondateur ; la même année, la mode fait sa révolution, avec l’apparition du prêt-à-porter et plus tard des premiers stylistes.
Dans les années qui vont suivre, Mary Quant va à sa façon bouleverser les mœurs et les attitudes et imposer sa mini-jupe comme référence dans les années 60. Pierre Cardin, André Courrèges, Paco Rabanne, des créateurs qui imaginent le futur, marqueront également cette époque.
Un nouveau mode de vie symbolisé par les Mods, puis le Swinging London et les mannequins The Shrimp, Twiggy,est en train de naître.

Twiggy

Mary Quant et Vidal Sassoon
L’Helvetica s’inscrit donc parfaitement dans cette tendance sociétale, ce désir de modernité et de lignes pures. Débarrassée de tout superflu, elle n’interfère pas avec le sens du texte, l’attrait artistique du caractère s’efface devant le message, voilà sa modernité.
Son dessin, sa très grande lisibilité, quelle que soit sa taille, sa grande richesse, sa neutralité et aussi le fait qu’elle puisse être utilisée dans toutes les occasions, fait le succès de cette police de caractère. Elle est d’ailleurs si populaire qu’elle a généré un véritable culte autour d’elle, il y a les pros, les anti, les fanatiques ou les obsédés.
Cette année un documentaire complet, Helvetica, réalisé par Gary Hustwit, lui est dédié. Gary Hustwit dit avoir voulu découvrir pourquoi l’Helvetica avait connu un tel succès.
«Je montre l’Helvetica en action dans différentes grandes villes du monde, je montre des gens qui sont en interaction avec cette écriture dans leur vie quotidienne.»


L’Helvetica dans le paysage urbain
Le film présente aussi des interviews de grands graphistes contemporains (Wim Crouwel, Hermann Zapf, Neville Brody, Stefan Sagmeister ou encore Rick Poynor…), qui donnent un aperçu de leur manière de travailler.
«Mon film est aussi une introduction à la typographie et à la manière dont elle fait partie de notre vie, sans que nous en soyons vraiment conscients.» (Gary Hustwit)
Il est devenu clair pour le réalisateur que son sujet traiterait aussi de l’histoire du modernisme et du post-modernisme des 50 dernières années dans le design.
La petite robe noire et l’Helvetica présentent beaucoup de points communs, leur naissance tout d’abord, qui correspond à une période clef de l’histoire ; la petite robe noire, proposée avec succès au milieu des Années 20 par Gabrielle Chanel, s’inscrit à une période où les femmes découvrent une nouvelle liberté ; le vêtement participe à cette émancipation ; exit les vêtements corsetés, la petite robe de Chanel adoptera une coupe simple, confortable et aisément imitable, le noir alors couleur des veuves et des domestiques descend dans la rue. L’Helvetica, nous l’avons vu plus haut, correspond et accompagne ce besoin de modernité dans notre société.

Catherine Deneuve en Chanel et son double en version imprimé « maison » Helvetica…
La petite robe noire, aujourd’hui modèle incontournable de toute garde-robe, peut paraître à la fois sobre ou sophistiquée, elle peut se porter au bureau ou à un cocktail.
Selon la manière dont on l’accessoirise, le tissu dont elle est faite, sa coupe, sa longueur de manche, son encolure, elle peut adopter une infinie variation de styles, tantôt discrète, passe-partout, populaire et tragique avec Édith Piaf, bourgeoise portée par Catherine Deneuve (époque Buñuel), artiste chez les existentialistes, qui l’ont érigée en uniforme, sulfureuse, moderne, révolutionnaire, ou encore chic pour un breakfast chez Tiffany’s…

Robe noire solennelle pour Juliette Gréco, muse des existentialistes

Robe noire fourreau, pour Audrey Hepburn (Givenchy)

Robe noire, sculpturale et terriblement chic (Balenciaga, 1967)
L’Helvetica, de par ses caractéristiques intrinsèques, peut être utilisée pour tout type de communication, de l’image de marque de la boutique Colette, Muji, Comme des Garçons ou encore pour les magazines pointus Self Service et Surface.
On la retrouve sur les panneaux signalétiques du code de la route, les enseignes de magasins, en 1964 pour la signalétique des J.O de Tokyo, mais aussi pour des marques aussi variées que Lufthansa, Nestlé ou Evian…
L’Helvetica accessible à tous fait partie de notre paysage quotidien.

Colette, Bless, Evian, Pan Am, Kawasasaki, Intel… De multiples logos, dans des domaines très variés.


Ces deux symboles, procèdent donc de la même façon et ont été réinterprétés saison après saison par différents designers assurant ainsi leur caractère intemporel, incontournable.
De Yohji Yamamoto en passant par Azzedine Alaïa, Issey Miyake, Jean-Paul Gaultier, Christian Lacroix, Hugo Boss, ou encore H&M pour la mode…

Robe noire transparente, encolure et bandes noires géométriques, rigoureuse et sensuelle (Prada, automne-hiver 2001-2002)


H&M en version chasuble, légèrement évasée et robe tablier courte, à moins de 30 euros, la « petite robe noire pour tous » (automne-hiver 2007-2008)
… de David Carson à John Maeda, en passant par Paul Rand, Experimental Jet Set ou encore Neville Brody pour le graphisme.

Affiche éditée en 100 exemplaires numérotés, pour la sortie du documentaire de Gary Hustwit, par l’agence hollandaise Experimental Jet Set, lire l’explication de la naissance de ce projet ici.

Affiche réalisée par le studio londonien Build, édition limitée à 100 copies

Tribeca, Issey Miyake, affiche par Neville Brody

Tribeca, Issey Miyake, affiche par David Carson

Affiche par Peter Bradford

Emil Ruder, 1958

John Maeda pour Shiseido, 1997

H5, pochette de Midnight Funk l’album de Demon, 2001
Pour approfondir le sujet
A voir
Helvetica « curated by » Gary Hustwit.
A lire
La petite robe noire, de Didier Ludot
Helvetica, hommage to a typeface, Lars Müller
Sur le web
L’habit fait le moine, Arte TV
Apprenez à différencier l’Helvetica de l’Arial
Jouer : Helvetica vs Arial
Pour écrire
L’Helvetica qui s’est considérablement agrandie (environ 200 polices de caractères !) est aujourd’hui distribuée par Linotype. Elle est composée de 3 familles :
Helvetica
Helvetica Neue
Helvetica World
Comment différencier l’Helvetica de l’Arial ?
L’Helvetica, police de caractère la plus utilisée dans le monde, à loupé son entrée dans le monde numérique, la plupart des utilisateurs d’ordinateurs connaissent parfaitement l’Arial, dessinée par Monotype et que Microsoft décida d’implanter par défaut, au début des années 80, afin de réduire les coûts, dans son système d’exploitation équipant 95% des ordinateurs de la planète : Windows. Apple dans le même temps, optait pour l’Helvetica et le distribue aujourd’hui encore au sein de Mac OS X.
Ce revers n’ayant en rien fait disparaître l’Helvetica, les graphistes professionnels ont toujours en tête cette consigne : « si vous ne savez pas quelle typo utiliser, prenez l’Helvetica », on pourrait ajouter en paraphrasant Christian Dior : « si vous ne savez pas quoi mettre ce matin, optez pour une petite robe noire ».