AU DELA DU RÉEL, LES NOUVELLES FRONTIÈRES

L’Escapisme, qui désigne la tendance à chercher refuge dans des mondes imaginaires, est un phénomène ancien et persistant. Les moyens d’évasion ont évolué au fil du temps, allant des contes racontés au coin du feu, aux romans du XIXe siècle et jusqu’aux séries en streaming aujourd’hui. Les explorations virtuelles du Metaverse s’inscrivent dans cette tradition, offrant une immersion profonde dans des univers fictifs. 

Cette plongée dans des univers imaginaires, facilitée par les progrès technologiques, s’inscrit dans le continuum du désir humain d’échapper à la monotonie du réel (?)

« Total Recall », œuvre visionnaire, basée sur une histoire de Philip K. Dick interrogeait déjà les frontières de la réalité et la capacité des technologies à engendrer des expériences indistinctes du vécu.

Ces technologies intensifient l’exploration, estompant les lignes entre le réel et le virtuel, entre l’expérience authentique et le simulacre.

Des répercussions tangibles sur notre comportement dans le monde réel peuvent alors se produire, les caractéristiques ou les actions d’un avatar peuvent influencer l’attitude hors ligne, de l’utilisateur, on peut y voir des liens avec l’effet Proteus (du dieu grec Protée),

Ce constat rejoint les interrogations médiologiques, telles que conceptualisées par Régis Debray, sur l’influence des médias et des technologies sur notre manière de vivre, de communiquer et d’interagir avec notre environnement et les uns avec les autres.

En effet, la Médiologie, nous offre des clefs de lecture pour décrypter cette mutation. Régis Debray scrute les entrelacs de la technologie, de la culture et de la transmission des pensées à travers les âges, et comment celles-ci façonnent les sociétés humaines.

Le Métavers, vu sous cet angle (et non pas uniquement comme un espace pour y faire des affaires), se présente comme le zenith de ces dynamiques, redéfinissant non seulement notre rapport à la technologie mais aussi nos habitus.

Cette porosité soudaine entre avatar et individu pose aussi des questions essentielles sur la redéfinition de notre identité et de notre subjectivité par les nouvelles technologies.

Dans ce contexte, le rôle des géants technologiques devient central, eux qui investissent massivement pour captiver les utilisateurs le plus longtemps possible, afin de les transformer en consommateurs.

Cette économie de l’attention avec sa démarche de saturation de l’espace et du temps  (voir le concept de Surmodernité étudié par Marc Augé) interroge sur la centralisation du pouvoir, la privatisation de l’espace virtuel et la commercialisation des expériences humaines.

La Médiologie par son approche transversale nous engage à réfléchir aux conséquences de ces évolutions, non seulement du point de vue individuel, mais aussi collectif, touchant à la culture, à la société, et à la transmission du savoir.

Nous voici confrontés à des défis inédits tels que les répercussions de ces progrès : excès individuel > repli narcissique > difficulté de la relation avec les autres > oubli de la distance et le temps réel, substitueés par des rétrécissements…

Il devient crucial de sonder, de critiquer les bases et d’esquisser un cadre d’analyse pour saisir les enjeux de cette nouvelle frontière et envisager les voies futures de notre évolution socioculturelle..