
Vava Dudu n’est jamais front row, ni même au second plan. Elle est celle que l’on aperçoit au second regard : bariolée, tout au fond, affairée, habitée d’une présence presque chamanique.
On devine alors que c’est elle qui, en secret, a soufflé à l’oreille des créateurs, les a inspirés, telle une muse.
Je l’ai croisée pour la première fois il y a bien des années à la Fiac. Elle était aux côtés de ses amis Nadège Winter et Maroussia Rebecq.
Plus tard, au Festival de mode et de photographie d’Hyères, je la retrouve par hasard, non pas sous le soleil des allées de la villa de Noailles mais dans l’ombre des coulisses, au milieu de jeunes créateurs transis, les assistants à procéder aux ultimes ajustements.
Cette manière de rester en retrait ne l’a pas empêché d’attiser la curiosité de Jean Paul Gaultier, de remporter en 2001 le prestigieux prix de l’Andam ou de concevoir des tenues de scène pour Björk ou Lady Gaga.
Le nom d’artiste de Valérie, Vava Dudu, représente-t-il un double égotique, un avatar? Il porte en tout cas les échos de son enfance antillaise et résonne comme une incantation murmurée lors d’une séance de vaudou.
Dans sa pratique transversale, le vêtement se fait insubordonné, dans la plus pure tradition punk. Outre sociale, il devient le support d’une profanation esthétique.
Le dessin, l’écriture, le corps qu’elle met toujours en jeu prolongent son geste pluridisciplinaire. Depuis 2003, la musique s’y est greffée avec La Chatte, groupe d’électro‑punk où l’énergie brute se mêle à la poésie.
Irrévérancieuse et radicale depuis toujours, Vava Dudu pousse les curseurs au‑delà des limites, sans violence mais avec un besoin irrépressible de collectif , qui confère à son travail une portée politique, un contre‑champ au capitalisme,
Son mantra, « en vous remerciant », circule partout : dans ses textes, ses illustrations, le titre de sa dernière exposition, comme une écholalie polie et ironique qui en dit long sur sa vision du monde.
Bien qu’elle appartienne à une génération précédente, Vava Dudu reste d’une actualité brûlante. Nous avons besoin de figures comme elle, plus en phase avec les désirs d’hypermodernité de notre époque que la cohorte de designers aseptisés qui peuplent aujourd’hui les maisons de mode, ou ceux qui se contentent de shows domestiqués, d’un spectacle‑mode — et non de ce qui pourrait être, au moins, une mode‑spectacle.
La Chatte, c’était il y a quelques jours au Petit Bain.









