Chère Adeline

Modestie, est le mot qui vient en tête lorsque l’on évoque un défilé d’Adeline André.

La Modestie est aussi un vêtement, une pièce de tissu que l’on plaçait sous le cou afin d’atténuer le décolleté ou masquer la naissance des seins vers la fin du XIXe siècle. Se cache derrière cette définition, une époque où la morale imposait de superposer voiles et jupes, un rapport très pudique au corps.

On peut y voir une certaine forme de délicatesse, un autre terme qui sied bien aussi à l’univers d’Adeline André…

Chez Adeline, le rituel se poursuit saison après saison. Les lieux se ressemblent, grands appartements dépouillés, murs blancs ou écrus, parquet brut, simples tabourets ou bancs d’écolier, point de faste néfaste et les blouses blanches s’affairent en coulisses afin de régler les derniers préparatifs.

La Couture n’étant plus ce qu’elle fut. Le prêt-à-porter n’étant plus son héritier depuis bien longtemps: qu’est-ce qu’un défilé Couture aujourd’hui? Le show-off, une simple question d’image? L’expression du savoir-faire de plusieurs corps de métiers? La marotte d’un créateur, la soupape d’un « couturier-auteur(1) »? Une discipline en voie de disparition? Un gouffre financier? Un peu tout çà sans doute et saison après saison on s’y rend toujours avec la même curiosité, l’envie d’être émerveillé et surpris.

On recherche ce choc visuel et technique, qui nous fera dire « Waow! » (comme la sublime présentation Couture de Ricardo Tisci pour Givenchy).

(1) Olivier Saillard

Adeline André, fait passer son message saison après saison, celui d’une créatrice indépendante. Démontrant la possibilité d’exister en Couture avec des moyens sans comparaison possible d’avec celui des grandes maisons tout en étant capable de créer ce choc.

Adeline André transcende certains domaines de la mode, se pose contre la rupture et le changement permanent, propose une apologie de la lenteur.

Saison après saison l’œil non-averti peut croire à des redites, récurrence des mannequins, des matières, des couleurs, des volumes. Il s’agit d’une recherche continue, un work-in-progress, un laboratoire des subtiles variations.

Notre époque privilégie les rythmes élevés, mais les sourires statiques de Mona Lisa des mannequins, leur démarche lente et mesurée ne communiquent aucune mélancolie, bien au contraire.

Ci-dessous, robe longue comprenant trois superpositions de georgette de soie et gants longs « siamois »

On y vient pour y voir les prouesses de la créatrice, son savoir-faire. On y admire ses robes flottantes et sensuelles, robes de vestales tenant par un fil ou un point de couture, laissant apparaitre la peau par transparence, de larges fentes, de grands décolletés ou encore par des crevés.

Fentes dans une manche appelées « crevés »

Backstages, à droite Charlotte Flossaut la fidèle.

Le rituel

Les mannequins vont et viennent lentement en robe longue coupée dans le biais ou plissé Watteau, glissent on the runway. Puis les hommes se présentent et galamment retirent leur veste 3E en melton ou doeskin de laine pour en vêtir leur compagne. Le veste, oversize désormais, devient manteau (vidéo ci-dessous).

Please to meet you Courtney

During the fashion week SS 2011 it was a pleasure to assist at miss Courtney Love’s showcase hosted by Le Printemps Paris, a party set by V magazine.

Enjoy the grungy-cover of Madonna’s « Like a prayer » and look at the Riccardo Tisci for Givenchy’s lace-only-nothing-to-hide outfit of the rock-goddess.

And yes, the shitty video is here !

Modern dandy

L’été est pour moi saison propice à un rattrapage culturel.

La période estivale a débuté par l’écoute de l’album de Grinderman, alias Nick Cave et une bande de musiciens plus hirsutes les uns que les autres. L’australien en est à sa énième transformation, fFondateur de l’emblématique groupe punk The Birthday Party, leader du groupe Nick Cave and the Bad Seeds et depuis 2007 leader de ce groupe baptisé Grinderman.

A écouter sur ce disque Electric Alice(1).

Avec sa moustache à la Jules Barbey d’Aurevilly et les senteurs d’opium (si chères à Charles Baudelaire) exhalant de ce court-métrage, nul doute que Nick Cave s’inscrit dans cette lignée de dandys…

Les sonorités orientales se marient parfaitement avec ce morceau, j’aime le style Nick Cave, costume sombre, ajusté, sur une chemise négligemment ouverte sur la poitrine, il dégage une certaine fureur mêlée de nonchalance, il offre une certaine élégance au milieu de la luxure, une certaine tension au milieu des corps alanguis, de la mélancolie au sein de l’euphorie. Le geste est maniéré et étudié.

Comme Leonard Cohen, Tom Waits, David Bowie ou plus proche Daniel Craig (habillé par Brioni puis Tom Ford dans Quantium of Solace), il fait partie de ces hommes qui possèdent élégance et mystère, mais aussi ce côté excessif et borderline propre au dandy, car ce dernier plus qu’une gravure de mode, est un avant tout un style de vie et une attitude.


Jules Barbey d’Aurevilly

Modern dandies de l’été 2009…


Dior, printemps-été 2009, (c) Vogue.


Givenchy, printemps-été 2009, (c) Vogue.


Paul Smith, printemps-été 2009, (c) Vogue.

(1) dédié à Alice Coltrane, femme du jazzman John Coltrane.

Typographie de luxe

En 2000, Christian Schwartz et Dino Sanchez designers et fondateurs de la fonderie Orange Italic ont mis en évidence certains traits caractéristiques des marques sybaritiques, soucieuse de procurer un plaisir raffiné: soucis du détail, qualité, artisanat, aisance, volupté, etc. Dès lors ils ont appliqué ces principes afin de créer une famille de polices de caractères justement nommée Luxury Display.

Rien est à négliger lors de la vente d’un produit de luxe, du choix de la couleur de l’étiquette, à la couleur du fil, au papier de soie pour l’emballage, au choix de la typographie.


Les polices de caractères de la famille Luxury Display disponibles chez House Industries


Ci-dessus la fonte Giorgio commandée en 2007 par l’excellent T Magazine et dessinée par Christian Schwartz.

La Giorgio répond a des attentes précises alliant minimalisme excentrique, élégance inspirée du tailoring et un regard modernisé sur les années 30.

Pour en savoir plus sur cette fonte.

Mercato d’hiver

Lu la semaine dernière dans la presse (Le Figaro), un état des lieux des directions artistiques des différentes maisons de couture. Force est de constater que cela a énormément bougé, que ce soit pour la mode homme ou la mode femme.

La tendance est d’intégrer sur la plus haute marche de la création non pas une diva, mais un créateur au profil « studio de création ». Chloé et Gucci avaient lancé la tendance, précise l’article ; en effet Phoebe Philo a remplacé Stella Mc Cartney et Frida Giannini a succédé à Tom Ford ; le mouvement s’est accéléré et d’autres maisons ont suivi (Calvin Klein…).

En plus de cette tendance de fond, une série de « transferts » se sont opérés depuis le début de l’automne, chamboulant la carte des DA des maisons de couture parisiennes ; ainsi on retrouve Paulo Melim Andersson chez Chloé (exit Phoebe !), le talentueux Olivier Theyskens chez Nina Ricci, Dai Fujiwara chez Issey Miyake, Giles Deacon chez Daks, Nicolas Andreas Taralis chez Cerruti, Sophia Kokosalaki chez Vionnet, Damian Yee chez Guy Laroche ou encore Peter Dundas chez Ungaro.

Plus dure est la situation de la mode masculine : plusieurs maisons ont en effet pris le virage du relifting, mais sans le succès connu par Dior Homme, hélas… Au vu du travail réalisé par Oswald Boateng chez Givenchy, ou encore Jason Basmajian pour ST Dupont, cela me semblait prendre bonne tournure, les lignes se modernisant, attirant de facto une nouvelle clientèle. Mais les résultats financiers n’étant pas bons, ou en tout cas pas assez rapidement bons, Franck Boclet a ainsi quitté Smalto, Oswald Boateng est sur le départ, Jason Basmajian a été remercié et Pierre-Henri Mattout est également sur le départ chez Dormeuil…

Les maisons de couture masculine ou féminine n’ont aujourd’hui plus le temps, ni l’argent, les résultats financiers doivent se voir quasi-immédiatement ; les créateurs ont donc pour mission de « générer du cash » le plus rapidement possible, sous peine de se voir remercier rapidement, et ce, quel que soit leur talent.

Dans un autre registre, mais concernant toujours les changements de créateurs, Irène Leroux a quitté Erès (groupe Chanel), LA marque de maillots de bain et de lingerie qu’elle avait créée en 1968. Elle sera remplacée par la styliste Valérie Delafosse. Il sera intéressant de suivre les nouvelles (?) orientations de style que cette dernière va y apporter.

Au milieu de ce constat, seule la maison LVMH et ses énormes moyens financiers peut se donner le temps de « recadrer » un John Galliano – avec le succès que l’on sait – et de redéfinir la mode masculine avec Hedi Slimane. Karl Lagerfeld et ses 24 ans chez Chanel fait figure de héros… génial héros, qui a su relancer, moderniser, recréer et propulser la maison de la famille Wertheimer. Quel créateur intégrant une maison peut « espérer durer » autant que lui aujourd’hui ?

Haute-Couture automne-hiver 2006-2007

Les collections automne-hiver 2006/07 de Haute-couture(1) vont défiler à Paris prochainement, l’occasion de lister les différentes maisons participants à cet évènement.
Tout d’abord la première info de taille, Madame Carven est toujours vivante ! A bientôt 97 ans, elle assistera au défilé de sa maison de couture qui réintègre le calendrier Haute-Couture et dont le directeur artistique est aujourd’hui Pascal Millet.

Les huit membres de la Chambre syndicale de la haute couture
Adeline André, Chanel, Christian Dior, Christian Lacroix, Dominique Sirop, Franck Sorbier, Givenchy, Jean-Paul Gaultier

Les invités permanents
Carven, Anne Valérie Hash, Felipe Oliveira Baptista, Elie Saab, Giorgio Armani, Valentino et le duo de couturiers d’On aura tout vu, Eymeric François et Maison Martin Margiela
sont des maisons qui ne remplissent pas forcément les critères haute-couture, mais qui techniquement présentent des modèles Haute-Couture. Après plusieurs saisons, ils peuvent prétendre au statut d’invités permanents.

Les défilés sont aussi l’occasion pour de jeunes créateurs français ou étrangers de présenter leur collection en marge du calendrier officiel. Cette saison on trouvera
Georges Hobeika, Robert Abi Nader, Gérald Watelet, Georges Chakra, Eric Tibusch (ancien de chez Jean-Paul Gaultier), Gavin Rajah (sud-africain) et Ritu Beri, indienne (ancienne de chez Jean-Louis Scherrer).

(1) L’appellation Haute-Couture est appellation contrôlée, les maisons devant remplir des condition strictes pour intégrer ce calendrier (nombre d’employés, participation à un quota de grands défilés, utilisation d’une certaine surface de tissu, etc.)

Ozwald Boateng

Oswald Boateng, 38 ans, né au Ghana est aujourd’hui LE tailleur de Savile Row dont on parle le plus. Non content d’être celui qui a permis à la célèbre rue londonienne d’être à nouveau sur le devant le scène (notamment grâce à l’ouverture d’une boutique en son nom aux Etats-Unis), il est également le tailleur des stars (Samuel L. Jackson, Usher, David Bowie, Jude Law…) et à reçu de la part de la reine Elisabeth l’Ordre de l’Empire Britannique.

Oswald Boateng, 38, born in Ghana is the Savile Row tailor of the moment, he recently received from Queen Elizabeth the Order of the British Empire. He is the one that helped the famous London street to get back on the front of the stage (thanks to the opening of a shop in the U.S.). He is also the tailor of the stars (Samuel L. Jackson, Usher, David Bowie, Jude Law …).

Mais c’est avant tout pour sa propre ligne éponyme et son succès depuis deux saisons en tant que directeur artistique de Givenchy homme qu’il nous intéresse. Sa ligne qu’il définit comme étant forte, masculine dans la pure tradition britannique est dynamisée par de vives couleurs pour les doublures et une coupe très sexy. Chez Givenchy son travail est plus fluide et féminin.

But first of all we are interested by his eponymous line and its success over the past two seasons as artistic director of Givenchy menswear. His line that he defines as strong and masculine, in the British tradition, is driven by strong colors and a very sexy cut. At Givenchy is work is more fluid and feminine.

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Suzy Menkes’ article

Photo credit: Amit Lennon, Camera Press / Retna